Dans une tribune au Parisien-Aujourd’hui en France, Christian Pimont président de l’Alliance du commerce, Jacques Ehrmann président du CNCC et François Feijoo, président du PROCOS appellent à revoir leur taxation des entreprises de e-commerce pour financer les baisses d’impôts promises par Emmanuel Macron.
Pour clore le grand débat, Emmanuel Macron a fait une série d’annonces censées répondre aux griefs exposés par les Français ces derniers mois. Parmi celles-ci, une baisse de l’impôt sur le revenu qui devrait concerner environ 15 millions de foyers et coûter 5 milliards d’euros à l’Etat. Pour financer cette mesure, le gouvernement réfléchit à plusieurs pistes dont celle d’un coup de rabot sur certaines niches fiscales dont bénéficient les entreprises.
Certaines de ces niches sont sans doute contestables, mais plutôt que de frapper les entreprises tous azimuts et d’entamer un bras de fer avec des organisations patronales plutôt bienveillantes jusqu’à présent, le gouvernement aurait intérêt à considérer d’autres pistes de réflexion et à prendre une mesure plus ciblée. Un secteur apparaît particulièrement avantagé : celui de l’e-commerce.
Un bref coup d’œil suffit à mesurer l’inégalité devant l’impôt entre commerce physique et numérique. Par nature, le second n’est pas, ou très peu, assujetti aux impôts fonciers qui pèsent lourd dans les comptes des commerçants. Au titre de la fiscalité locale, les entreprises de commerce ont versé plus de 43 milliards d’euros en 2017. La seule taxe sur les surfaces commerciales a été multipliée par six en dix ans. Si les acteurs de l’e-commerce devaient s’acquitter des impôts en proportion de leur part de chiffre d’affaires dans le commerce en général, de l’ordre de 9 %, c’est 4,2 milliards d’euros qui entreraient dans les caisses de l’Etat. C’est dix fois plus que le rendement escompté de la taxe Gafa, discutée au Parlement.
Il faudrait faire évoluer notre système fiscal pour diminuer la pression foncière et plutôt taxer la valeur ajoutée créée par toute vente auprès d’un résident français. Car c’est là aussi que le bât blesse. Les plates-formes d’e-commerce échappent largement au paiement de la TVA. Ces places de marché hébergent nombre de vendeurs situés en dehors du territoire et ne se soucient guère de la collecte de la taxe. De plus, les envois inférieurs à 22 € sont exonérés de son paiement, une niche normalement pas applicable au commerce en ligne mais qui a fait prospérer la fraude, et dont le contrôle est impossible du fait du nombre d’envois. Le manque à gagner pour l’Etat au titre de la TVA se situerait entre 1,5 et 2 milliards d’euros par an.
Les règles en matière de TVA sont amenées à évoluer puisque l’Union européenne a adopté de nouvelles normes qui changent les obligations applicables aux sites d’e-commerce. Ceux-ci seront désormais en charge de la collecte de la taxe, y compris pour les vendeurs tiers et l’exonération au bénéfice des petits envois sera également supprimée. Il faut se réjouir de ces évolutions, même si elles n’entreront en vigueur qu’en 2021. Il restera encore à régler le problème de la concurrence fiscale déloyale qui persiste entre pays européens et qui permet à des acteurs comme Amazon d’échapper à l’impôt en localisant leurs bénéfices générés partout sur le continent dans des pays à la fiscalité très avantageuse.
Il ne s’agit bien sûr pas de punir l’e-commerce qui représente un secteur d’avenir, mais de rétablir les bases d’une égalité de traitement entre tous les acteurs.
Rétablir la justice fiscale n’aurait pas comme unique avantage de combler un besoin de recette, cela permettrait aussi de redonner un souffle au commerce local dont le déclin participe à la désertification des centres-villes et au malaise des territoires. En ce sens, ce serait aussi répondre à de nombreuses revendications issues du mouvement des Gilets jaunes. La fiscalité seule ne suffira pas à revitaliser villes et villages, mais elle peut être un catalyseur.
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